"Tout homme est tiraillé entre deux besoins. Le besoin de la Pirogue, c'est à dire le voyage, de l'arrachement à soi-même, et le besoin de l'Arbre, c'est à dire de l'enracinement, de l'identité. Les hommes errent constamment entre ces deux besoins en cédant tantôt à l'un, tantôt à l'autre., jusqu'au jour où ils comprennent que c'est avec l'Arbre qu'on fabrique la Pirogue"
Proverbe Malésien (raconté par notre amie Clem)
C'est au café d'El Bolson que je (jérémy) reçois un mail de mes anciens collègues maraîchers Bretons. Ils me proposent de candidater à leur nouveau projet de création de microferme urbaine dans le quartier de Bois du Château à Lorient! L'idée est d'accompagner pendant 2 ans 5 jeunes maraichers à l'installation sur une microferme d'un hectare dans un parc paysager au pied des tours HLM du quartier. Remettre les mains à la terre, réintégrer l'agriculture bio en ville et l'apporter dans les quartiers les plus défavoriser de Bretagne? La petite graine d'idée germe dans ma tête et je n'arrive pas à la chasser.
Le problème dans cette histoire... c'est que ça commence dans 1 mois!!
Alors là tout se chamboule... Nous ne sommes qu'à la moitié de notre "roadtrip" avec le papou, à l'autre bout de l'Argentine, rien n'est prêt, surtout pas nous, jamais nous n'avions imaginé rentrer si tôt! D'un côté, voilà déjà un an et demi que nous voyageons, oui mais voilà, on était bien, on aurait pu continuer à vivre comme ça des années! Et puis on arrivait enfin presque au Brésil tant rêvé, et puis en Uruguay dont tout le monde nous chantait les louanges! Et puis d'un autre côté il y a les mariages des copains en France, on pourrait leur faire la surprise... C'est le cataclysme dans nos têtes et on ne sait plus réfléchir. Drôle d'ambiance dans la voiture, et drôles de vacances pour mon père... Mais heureusement qu'il est là pour arbitrer!
Finalement el Papou s'en retourne à son travail, et nous décidons de laisser jouer le destin et attendons la réponse à la candidature (que j'ai bien sûr envoyé, cela ne coutait rien...) chez Marcela et Alanis à qui nous filons quelques coups de mains, surtout Anaïs avec ses peintures murales. Réponse dans 2 semaines (interminables), le lundi 25 mars. Si la réponse est positive, Je commence le boulot lundi 1er avril!
Jeudi 21 mars, un peu en avance, nous recevons la réponse.
POSITIVE. RDV Lundi matin à Lorient 8h30.
Dans la foulée nous prenons nos billets d'avion El Calafate - Buenos Aires - Madrid - PARIS.
Là c'est coup de bambou.
Nous réalisons alors ce que signifie ce retour : Adios America Latina, adios veloavoile, adios la bicicleta, adios amigos! C'est le coeur lourd que nous démontons nos vélos pour la dernière fois.
Mais il nous aurait bien fallu passer par là un jour, et le projet de ferme est trop beau pour être refusé, une opportunité à prendre ou à laisser, qui ne se présentera pas 2 fois!
Et 2 jours de voyages en avion c'est long et épuisant mais ça passe quand même plus vite qu'un an et demi à vélo. Nous survolons l'Uruguay et le Brésil. Il fait très beau et il doit faire chaud. Les routes ont l'air superbes, surtout pour y faire du vélo! Puis nous retraversons l'Atlantique en sens inverse, les larmes aux yeux, les images du voyage nous repassent devant les yeux. 9500 km dans les pattes et surement autant de photos, on reviendra! Lorsque nous étions rentrés la première fois en urgence pour retrouver ma petite soeur à l'hôpital, nous avions hâte d'arriver, cela nous faisait du bien de rentrer se reposer des Andes, retrouver la famille faire une coupure dans le voyage... Mais nous avions un billet aller-retour pour Santiago du Chili. Ce vol là c'est tout l'inverse car nous savons que l'atterrissage est définitif. Nous nous répétons le proverbe de Clem pour nous rassurer, l'Arbre et la Pirogue...
3 jours après l'atterrissage, me voilà au champ. Le temps est glacial et je plante des oignons sous une pluie battante. Je pense au Brésil et à mon vélo... Les deux premières semaines, un peu morose, il me faut toujours un petit temps le matin pour me motiver. Je me pose sans cesse la question "ai-je pris la bonne décision? Anaïs aurait voulu continuer et la voilà seule à rechercher des annonces de location de maison."
Mais petit à petit le soleil prend la place de la pluie et Anaïs prend les rennes de sa nouvelle petite entreprise de dessins, artisanats et paysages, pleine d'entrain et "d'inspirations naturelles" nées en voyage! Au champs je fais de superbes rencontres, des gens d'un peu partout dans le monde arrivés en France depuis plus ou moins longtemps et qui ont eux aussi un parcours singulier, pas toujours simple. Nous rencontrons beaucoup de Brésiliens! Alors ça nous réconforte un peu et nous parlons Espagnol dans les champs (avec les chiliens).
Nous commencerons à installer la ferme de Bois du Château dans 3 mois. En attendant nous cultivons les jardins de Pont Scorff et Riantec, 2 fermes d'insertion du réseau Cocagne. Nous apprenons à nous connaitre en travaillant ensemble et potassons les plans de la future ferme. D'ailleurs, un film documentaire sera tourné sur le lancement de ce projet!
Une nouvelle aventure vient de commencer et nous sommes tous les deux plus proches que jamais.
Un grand MERCI à vous tous, qui avez suivi ce blog, nous ont encouragés tout au long de ce long voyage, sont venus nous voir, nous ont accueillis au hasard des rencontres, sur le vélo, tous sales, dans un abri bus, un jardin, une montagne, une forêt, ou un super lit warmshower!
Une chose est sûre, le vélo c'est pour la vie! Aujourd'hui il est hyper important de faire des choix pour l'écologie, car c'est maintenant qu'il faut agir, roulez roulez roulez à vélo! Prenez exemple sur Laurent et Danièle des Monts d'Arrées qui ont acheté des vélos pour toute leur famille après avoir assisté à notre conférence à Brest! 30mn de voiture pour aller au boulot, c'est long, mais 30mn de vélo, ça passe vite!! Et ça fait du bien à tout le monde, les jambes, l'esprit, la planète jusqu'aux oreilles des voisins!
Écrire commentaire